12 mars 2015

Régine Pernoud, sur le délit d'opinion


« (...) Quelle époque peut mieux que la nôtre comprendre l'Inquisition médiévale, à condition que nous transposions le délit d'opinion du domaine religieux au domaine politique ? Il est même très surprenant pour l'historien de constater cette montée, envahissante en tous pays, de la sévérité envers le délit d'opinion politique. Toutes les exclusives, tous les châtiments, toutes les hécatombes semblent en notre temps justifiés pour punir ou prévenir déviations ou erreurs quant à la ligne politique adoptée par les pouvoirs en exercice. Et dans la plupart des cas il ne suffit pas de bannir celui qui succombe à l'hérésie politique, il importe de convaincre, d'où les lavages de cerveau et les internements interminables qui usent en l'homme la capacité de résistance intérieure.
Lorsqu'on pense à l'effroyable bilan, à la dépense insensée en vies humaines – pire encore que celle des deux « grandes guerres »... – par lesquels se sont soldées les révolutions successives et le châtiment des délits d'opinion en notre XXe siècle, on peut se demander si en ce domaine du délit d'opinion la notion de progrès ne se trouve pas mise en échec. Pour l'historien de l'an 3000, où sera le fanatisme ? Où l'oppression de l'homme par l'homme ? Au XIIIe siècle ou au XXe ? »

Régine Pernoud, Pour en finir avec le Moyen Âge (1979) ; éditions du Seuil / Points Histoire

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