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Paul Léautaud. - Il y a des vers que j'aime beaucoup, que je sais comme ça, mais vous savez qu'au fond, j'ai une horreur sans borne pour les poètes car il y a, dans la poésie française en particulier, une telle idôlatrie féminine !... Tous ces gens qui ont été à genoux, non, non !
Robert Mallet. -  Cela me semble curieux de vous  entendre parler ainsi. C'est tout de même un de vos ouvrage qui a le  plus contribué à faire rayonner la poésie française, au     début du XXe siècle ; et vous dites maintenant que la poésie est  ridicule.   
     P. L. -  J'avais trente ans quand j'ai fait ça.   
     R. M. -  Dans l'édition de 1928, quand vous avez augmenté le nombre des poètes du Choix, vous en aviez beaucoup plus...   
     P. L. -  Supposons que j'aie acquis cette antipathie pour les poètes vers cinquante ans. Voilà.   
     R. M. -  Je m'excuse de traiter un sujet qui vous est tellement antipathique, mais nous ne l'avons pas épuisé.   
     P. L. -  Cet agenouillement perpétuel ! Quand on prend la poésie  française depuis ses origines jusqu'aujourd'hui, il n'y a que l'odeur de  l'encens pour la femme...   
     R. M. -  Je crois qu'entre l'agenouillement de certains et vos coups de fouet, il y a une marge.   
     P. L. -  On pourrait faire des vers à la femme, n'est-ce pas, sans cette vénération, cette supplication. Non, non !   
     (...) » 
La suite en document audio :
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     R. M. -  En somme, ce que vous reprochez à la poésie, c'est surtout de trop attacher d'importance à la femme ?   
        P. L. -  Oui. Et puis, à partir du Romantisme, d'avoir méprisé toutes les règles de la langue française.   
        R. M. -  Méprisé toutes les règles ?... Un exemple de ce que vous  appelez le mépris, c'est sans doute l'emploi simultané par Valéry des  mots « indulgents » et « sculptés » ?   
        P. L. -  Je parle de Vigny, d'un tas d'autres poètes...   
        (...) »   
Paul Léautaud, Entretiens avec Robert Mallet (Cinquième entretien) ; Mercure de France (1951).   
 

 

 
 
 
 
 
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